Cheffe d’entreprise dans l’âme et diplômée d’école de commerce, Tessadith Demdoum est la fondatrice de Business Angels Algérie Diaspora (BAALDI) . Une  association qui aide les porteurs de projets en Algérie ou au sein de la diaspora à créer leur société. Elle nous explique pourquoi cette pratique doit prendre racine en Algérie.

Quelle est la genèse de l’association BAALDI que vous présidez?

Tessadith Demdoum : Le projet de l’association est venu suite à mes activités dans le conseil en développement international. Je voyageais entre l’Europe et l’Afrique du Nord, en particulier en Algérie où je faisais des séjours fréquents. Ces expériences professionnelles m’ont fait toucher du doigt la réalité de l’entreprenariat en Algérie. Certains chefs d’entreprise avaient des difficultés à développer leur entreprise dans de bonnes conditions. J’ai beaucoup réfléchi. J’ai alors pensé à une tradition bien de chez nous et qui remonte à la nuit des temps, celle de l’entraide inter-générationnelle.

Quelle sont les activités que vous organisez avec BAALDI ?

Il y a deux axes principaux : les business angels (financeurs-accompagneurs) et les porteurs de projets (créateurs d’entreprises, d’emplois, de richesses). Ces derniers ont particulièrement besoin de suivi, de formation permanente, de conseils pour le bon démarrage de leur entreprise, pour éviter les échecs et pour faire baisser le taux de mortalité de leurs sociétés.Le « ratage d’un super projet » a un impact sur le moral du jeune créateur et sur l’économie (chômage).

Qu’est ce qu’un Business Angel ?

C’est une personne qui accepte de s’engager pour soutenir un projet d’entreprise ou une jeune entreprise dans son développement.  Elle est là pour mettre le pied à l’étrier au jeune créateur, et lui permettre de créer des emplois et de la richesse rapidement. Elle est capable d’assumer le risque en investissant un peu de son argent personnel. En résumé, un business angel participe dans une entreprise en apportant un investissement financier direct, en partageant son expérience, en donnant ses conseils. Il est l’associé qui partage le succès de l’entreprise.

A quoi sert l’investissement des Business Angels?

C’est surtout lors de la phase de démarrage, « l’amorçage », que le créateur d’entreprise en a le plus besoin.  Le Business Angel est recherché lorsque la levée de fonds dont l’entreprise a besoin est faible.L’investissement peut aussi servir au développement.

Quels sont les profils des porteurs de projet?

L’Algérie est un pays où les jeunes sont très majoritaires. Les porteurs de projets sont jeunes à quelques exceptions près. Ils sont souvent diplômés.

Quels sont les freins avancés par les Business Angels ? 

L’environnement politique, économique peut être peut être utilisé comme excuse pour ne pas investir. C’est légitime pour ceux qui préfèrent avoir le maximum de garanties, mais un business angel est censé prendre des risques. Les investisseurs pourraient être plus motivés à devenir business angel s’ils trouvaient dans le pays où ils veulent investir des incitations fiscales et une sécurité (transfert d’une partie de l’argent de la plus value transférable dans le pays de résidence, réductions d’impôts sur le revenu personnel, etc). En général, le business angel engagé ne pense pas seulement aux freins. Il intervient pour valorises une entreprise. Il sait qu’il faut travailler à long terme puisqu’il se rémunère sur la plus value. Il peut revendre ses parts lorsque l’entreprise atteint sa vitesse de croisière comme il peut rester dans l’entreprise et engager un autre contrat.

Est ce que cette notion de Business Angels est bien comprise en Algérie?

Le but de l’association est de l’expliquer à ceux qui ne la comprennent pas.  Cette notion existait pourtant en Algérie. Autrefois dans les villages, quand un jeune avait un projet, ce sont des « business angels » qui l’aidaient. Cela fait partie de nos valeurs.On transmet l’expérience, le savoir faire. Il n’y a pas si longtemps quand un Algérien venait en France, il y avait toujours un Algérien qui était son business angel.

Les Business Angels que vous recherchez sont ils au pays ou à l’étranger?

Ils sont recherchés parmi les membres de la diaspora mais aussi sur le territoire algérien.

Quels sont les domaines d’activités qui pourraient intéresser les business angels en Algérie ? 

Il n’y a pas de liste exhaustive. Tous les projets peuvent susciter l’intérêt. Cela peut être dans la santé, l’industrie, le numérique, l’énergie renouvelable, l’environnement, l’agriculture, le tourisme, la logistique, la restructuration des petites unités de commerce de proximité. 

Quels sont les atouts dont dispose l’Algérie par rapport au reste de l’Afrique?

Il y a le capital humain. La population a des compétences avérées. Il ne faut pas oublier les grandes pontes qui ont du quitter l’Algérie parce qu’ils n’étaient pas reconnus à leur juste valeur. C’est un pays jeune qui a soif de réaliser ses rêves. Le chantier est vaste car tout est à faire. Il y a la position géographique. Le pays est bien situé entre l’Europe partenaire de proximité mais aussi l’Afrique subsaharienne. Le littoral est étendu, le sous-sol est riche, les paysages sont très diversifiés.La Température est favorable à l’agriculture.

Comment voyez vous l’Algérie dans les 25 années à venir  ?

La population est jeune et ambitieuse. Elle rêve de se réaliser. Elle sera aussi exigeante et se veut déjà « indépendante » de l’assistanat extérieur. Elle veut posséder les richesses du sol et du sous-sol de son pays et l’exploiter à son propre profit. Elle est confiante dans ses capacités. C’est à tous les algériens (institutions, associations, Etat, citoyens, universitaires …) de participer à cette grande et noble tache.

Entretien réalisé par Nasser Mabrouk