Carl Medjani a attendu le début d’année 2020, et d’avoir 34 ans, pour raccrocher ses crampons professionnelles et signer pour les six prochains mois une licence avec le club amateur du FC Salaise. L’ancien international algérien avait pourtant la caisse et le mental pour poursuivre encore quelques années à un bon niveau. Mais face aux impératifs familiaux, le choix a été vite fait par le principal intéressé. «  Physiquement et moralement, je pouvais tenir un bon rang professionnel.J’ai eu pas mal de propositions pour continuer ma carrière. Parfois la famille a besoin de nous.J’ai fait un choix de rester auprès de ma maman, ma femme et mes enfants », a t-il déclaré dans l’ émission Football Magazine sur les ondes de radio Alger Chaine 3.

La particularité du néo-retraité est d’avoir connu un parcours footballistique riche en expériences diverses.Une trajectoire ponctuée par un nomadisme qui ne l’aura jamais vu s’éterniser, sauf durant sa période ajaccienne (1Juil 2008 – 31Jan 2013), plus de deux saisons de suite dans le même club. Au final, ce seront treize équipes traversées et cinq pays visités qui auront amené le natif de Lyon à débuter par Liverpool avant de finir à Uhud Medina en Arabie Saoudite.

Une carrière de nomade

Carl Medjani n’aura jamais vraiment répondu aux attentes placées en lui quand en 2003, il sort frais émoulu du centre de formation de Saint-Etienne pour s’embarquer dans la grande aventure avec Liverpool. Un départ du coté de la Mersey alors qu’il vient de fêter sa majorité et qu’il n’a pas disputé la moindre rencontre avec l’équipe première des Verts. Un pari surtout risqué comme pour tout jeune de son âge et qui se soldera par des prêts successifs à Lorient et Metz. In fine, il ne réussira pas à s’imposer chez les Reds. La suite de sa carrière sera une alternance de contrats courts avec, à partir du mois d’aout 2014, une préférence pour des destinations plus ensoleillées comme Valence, Athènes ou Trabzon. 

Sa carrière en club reste somme toute très honnête pour un joueur qui aura su se montrer intraitable dans son secteur de jeu et dans les équipes par lesquelles il aura transitées. Un sens du devoir  qui attirera aussi le regard des dirigeants de la FAF et du sélectionneur de l’époque Rabah Saadane. En effet, grâce à ses origines algériennes du coté de son père, l’ex-stéphanois peut prétendre à une place en sélection d’Algérie. Ce sera chose faite en mars 2010 à quelques mois de la coupe du monde sud africaine. Le Gone ne le sait pas encore mais son destin international va s’inscrire pendant huit ans avec les Verts et lui apporter ses plus belles satisfactions de footballeur.

Des débuts timides avec les Fennecs

Ses premiers pas avec les Fennecs interviendront dans un contexte très particulier. Celui qui est alors un joueur de l’AC Ajaccio (Ligue 2) ne prend pas part aux qualificatifs pour le Mondial en Afrique du Sud. Il fera pourtant partie des sept éléments qui débarqueront opportunément, avec la bénédiction du président de la fédération de l’époque Mohamed Raouraoua, pour participer au plus grand événement footballistique de la planète. Non utilisé pendant tout le tournoi, le néo-international regardera depuis le banc de touche l’Algérie perdre par deux fois face à la Slovénie et aux Etats Unis (1-0 ), et faire match nul contre l’Angleterre (0-0). 

L’apprentissage se fait « sur la pointe des pieds » dixit le milieu récupérateur de 25 ans qui connaitra avec la sélection des lendemains de coupe du monde pas très glorieux. Cela commence avec l’éphémère passage à la barre technique d’Abdelhak Benchikha (2010-11). Ce dernier présentera sa démission après la cinglante et incompréhensible déroute face au Maroc (4-0) lors des qualificatifs pour la Can 2012.. Défaite à laquelle ne participera pas l’Ajaccien qui ne sera pas présent dans le groupe ce soir là. S’ensuivront les débuts difficiles de Vahid Halilhodzic avec une Can 2013 ratée. Dans un groupe D compliqué (Cote d’Ivoire, Tunisie et Togo), les protégés du Bosnien quitteront l’Afrique du Sud après s’être classés derniers de leur poule.

Après cette contreperformance sud-africaine le bateau Algérie tangue mais le capitaine Raouraoua décide de maintenir le commandement de bord à son poste. Une sage décision qui portera ses fruits quelques mois plus tard avec une seconde qualification d’affilée des Fennecs à un Mondial. Au grand bonheur de Carl Medjani qui vivra à ce moment là le sommet émotionnel de sa carrière. 

Le sommet émotionnel avec l’Algérie

Pour le Franco-Algérien, les prémices d’une belle et grande aventure avec les supporters algériens trouvent leur source lors du barrage retour qualificatif à la Coupe du monde au Brésil en 2014 face au Burkina Faso. A l’issue d’un match remporté par les camarades de Rafik Halliche (1-0), le stade Tchaker de Blida est en fusion. Les joueurs savourent cet instant magique qui leur ouvre les portes du Brésil. 

Contrairement à son statut de remplaçant quatre ans plus tôt, sur le sol sud-africiain, Carl Medjani est cette fois-ci un homme de base de Vahid Halilhodzic. Le Rhône-Alpin de naissance participe à tous les matchs de la phase de poule comme défenseur central face à la Corée du Sud (victoire, 2-4) ou au milieu  de terrain contre la Belgique (défaite, 1-2) ou la Russie (1-1). Malgré une absence  sur le terrain en huitième de finale face à l’Allemagne (2-1, AP), le Fennec garde en mémoire la qualification historique face aux Russes. « Le match qui m’a marqué est celui contre la Russie.Quand on aspire à se qualifier pour le second tour, on le coche. On savait qu’il nous fallait un nul pour nous qualifier, confiera-a-t-il à Maamar Djebbour sur Alger Chaine 3. Quand on tenait notre qualification à la 90è minute, c’est un rêve qui se réalise. C’est la récompense de tous les efforts fournis dans la préparation de cette coupe du monde ». 

Après huit années de bons et loyaux service, couronnés par quatre buts marqués et 62 capes, le joueur de 33 ans tire sa révérence avec le onze national le 7 juin 2018 en amical face au Portugal , soit quasiment 8 ans jour pour jour après son premier match en sélection, un certain 5 juin 2010 contre les Emirats Arabes Unis. De son long passage avec El Khadra, l’ex-internationalavouera avec sincérité dans l’émission Football Magazine son profond attachement à la tunique verte et blanche : « Je n’ai jamais triché avec l’équipe nationale. C’est mon meilleur club.Je serais content et fier de revenir et de dire au revoir à Tchaker qui m’a apporté tant d’émotions ». Espérons que le Président Zetchi entende l’appel de ce vaillant soldat à crampons.

Karim Ait Yahia