Avocate de formation, spécialisée en criminologie, Nour El Yakine Taïeb Ezzraimi cultive une passion pour l’art sous toutes ses formes. A 30 ans, la jeune femme organise à l’école Crescendo School de Blida – sa ville d’origine – une deuxième exposition (du 26 novembre au 10 décembre 2021) qui retrace son parcours artistique. Pour dzairworld.com, l’artiste autodidacte a accepté de se confier. Entretien avec une peintre qui navigue entre ciel et terre.
Pouvez vous vous présenter brièvement à nos lecteurs?
Nour El Yakine Taieb Ezzraimi : Je suis originaire de la ville de Blida (ndlr, 50km d’Alger).Je suis avocate et titulaire d’un master en criminologie. J’ai par ailleurs suivi des formations en entrepreunariat et en marketing digital. Parallèlement à cela, je suis artiste peintre autodidacte.
Peut-on dire que la criminologie et l’art correspondent à votre personnalité: un être à la fois raisonné mais qui a parfois la tête dans les étoiles ?
L’art et la criminologie sont deux mondes différents. Logiquement, il n’y a aucune relation entre eux mais je garde ce que j’aime sans aucune distinction. La criminologie, c’est mon domaine d’étude. L’art c’est mon identité. Elle coule dans mes veines depuis mon enfance. Je peux être les deux à la fois mais si un jour je devais choisir, ce serait l’art.
Voyez vous des passerelles ou des similitudes entre le métier d’avocat et la création artistique?
Absolument. Il y a des passerelles, des points en commun. Le métier d’avocat est très loin de mon univers artistique mais dans les deux domaines, l’objectif est noble. C’est l’humanité avant tout ! Le but de mon métier, c’est la réalisation de la justice. Dans l’art, c’est le partage de nos expériences, de nos échecs et de nos réussites à travers les différentes créations. C’est un message pour rappeler à l’humanité que nous sommes des êtres humains, des être avant tout sensibles. Ce qui nous touche, touche le reste du monde. Dans le domaine artistique, il n’y a pas de distinction entre les races, les religions, l’éducation.C’est la même chose dans le juridique où il faut l’égalité dans l’application des lois. Nous cherchons la vérité et la paix.
D’où vous vient cette passion pour l’art en général et pour la peinture en particulier?
L’art, c’est mon oxygène. Sans art, notre monde tomberait à l’eau. S’il n’y a aucune sensibilité dans la créativité, la vie n’a aucun sens. C’est comme une nature sans couleurs, comme l’hiver sans la neige, comme une soupe sans sel…. Je me sens proche de la création sous toutes ses formes (arts visuels, design, poésie,musique..). La peinture, c’est toute une histoire unique qui a grandi avec moi doucement. Elle se développe rapidement à chaque étape de ma vie. Le style de mon enfance est tellement loin de celui d’aujourd’hui. La nouveauté est très importante dans mon art.
Quelles sont les choses ou les artistes qui vous inspirent?
J’aime beaucoup les anciennes civilisations, les fresques qui se trouvent dans les ruines – surtout grecques et romaines -, l’avant garde, la technique, le mécanique, l’espace, les planètes , le futur …..J’adore Picasso, Frida Kahlo, Salvador Dalí, Baya, Denis Martínez, Mohamed Racim….
Vous êtes autodidacte. Comment définiriez vous votre style?
J’ai développé un style inspiré par l’art abstrait et par le surréalisme. Mon art est avant tout naïf. Mon empreinte est très claire dans mes peintures. On reconnait mon style même si je ne signe pas mes tableaux.
On remarque qu’en Algérie, beaucoup d’artistes – et notamment des femmes peintres – n’ont pas fait l’école des Beaux-Arts. Comment expliquez vous ce don assez répandu?
Pour moi, il n’y a aucune différence entre un artiste autodidacte et un « Beaux-Ariste ». L’importance est dans la créativité.
Quelle est votre appréciation de la scène culturelle algérienne ?
C’est difficile de la juger mais il y a un mouvement artistique par rapport à avant. Malgré toutes les obstacles, l’artiste existe toujours avec ses idées.
Vous organisez le 26 novembre prochain à la Crescendo School de Blida votre deuxième exposition sur votre parcours. Qu’est ce que le public va pouvoir découvrir?
C’est la deuxième édition de mon exposition intitulée » Mon parcours مساري ». L’exposition s’organise autour de plusieurs espaces artistiques qui sont autant de stations correspondant aux étapes de ma vie. Chacune racontera un concept artistique. Il y aura des objets de décoration, des tableaux, des installations, des performances musicales. Deux jeunes artistes en herbe, Tania et Mayline Azadou (9 et 6 ans) y participeront avec leurs peintures et leurs dessins. D’autres surprises sont prévues.
Dans un récent entretien, vous disiez vouloir amener l’art dans la rue. Pour quelles raisons?
Pour moi, l’art est partout et pas que dans les galeries ou les musées. J’adore le street-art. J’ai d’ailleurs collaboré à plusieurs projets artistiques dans ce domaine. Le but est la démocratisation de la culture de l’art de rue.Le public a droit à l’art. Une fresque sur le mur peut toucher les gens. Elle peut changer plusieurs choses dans leur vie.
Vous avez développé un concept que vous avez appelé « Nourism ». Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
Nourism est un concept qui regroupe plusieurs supports : vêtements, objets déco, accessoires… J’ai commencé cette été en lançant ma première collection de T-shirts NOURISM, inspirée de ma dernière série intitulée « La ligne ».
Avant de vous lancer dans cette aventure, vous aviez co-créé le magazine culturel en ligne Monokrom. A quel besoin répondait-il?
Monokrome est un magazine trimestriel en ligne et une plateforme artistique. C’est un projet basé sur le bénévolat qui a pour but d’aider, a travers des évènements, expositions, ateliers, les jeunes talents dans leur carrière artistique.
Votre autre actualité, c’est aussi un début de collaboration avec une société française catalane de Perpignan. Comment s’est passée la rencontre et quel sera votre rôle au sein de cette structure?
C’est une entreprise artisanale qui travaille sur la réalisation d’espadrilles et de tote bags (ndlr, sacs réutilisables) très originaux a travers la technique de petits points. C’est grâce au Directeur commercial, Monsieur Menouer Benfodda, qui a aimé mes créations, que je collabore avec eux.
Entretien réalisé par Nasser Mabrouk