L’ancien président de la république algérienne Abdelaziz Bouteflika, démissionnaire en avril 2019 suite aux manifestations du Hirak – mouvement populaire réclamant l’instauration de la démocratie en Algérie et la fin du système de corruption généralisée – est décédé vendredi à l’âge de 84 ans.
« Décès de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika », c’est par ce bref bandeau diffusé par la télévision nationale, et citant un communiqué de la présidence de la république, que le public algérien a été informé de la mort de l’ancien locataire d’El Mouradia.
Une longévité exceptionnelle au pouvoir
Chef de l’Etat ayant eu la longévité la plus importante à son poste – 20 ans entre 1999 et 2019 -, « Boutef » comme le surnommait la rue algérienne avait été chassé du pouvoir par l’armée, en avril 2019, alors qu’il briguait un cinquième quinquennat, en dépit d’un accident vasculaire cérébral (2013) qui l’handicapait sérieusement dans l’exercice de ses fonctions.
C’est en 1956, pendant la guerre d’Algérie, que le jeune Abdelaziz Bouteflika, alors âgé de 19 ans, s’engage dans l’Armée de libération nationale (ALN). Très vite, sa proximité avec Houari Boumédiène lui permettra d’occuper d’importantes fonctions administratives au sein de l’ALN.
Quelques années plus tard, en 1962, le virus de la politique le prend et ne le lâchera pas 60 ans durant. Il sera tout d’abord député de Tlemcen puis ministre de la Jeunesse, des Sports et du Tourisme dans le premier gouvernement Ahmed Ben Bella (1962-63) (https://bit.ly/3kixjPh). S’ensuivra, à 26 ans, une longue période à la tête de la diplomatie algérienne (1963 à 1979) sous Ben Bella – il participera d’ailleurs au coup d’Etat de 1965 contre de dernier -, puis sous Boumédiène.
Accusé d’avoir détourné des fonds, il prendra le chemin de l’exil durant sept années (1981-87) navigant ainsi entre Dubaï et Genève (Suisse).
Une réconciliation nationale à son actif
De retour sur le devant de la scène, à la fin du 20ème siècle, il se présente à la magistrature suprême en tant que candidat indépendant en 1999. Il parvient à être élu une premier fois – au premier tour après le retrait de tous les candidats -, avec 73,8% des voix. « Je suis l’Algérie tout entière », fanfaronnait-il lors de sa prise de pouvoir.
Ses deux décennies au sommet de l’Etat seront principalement marquées par la réconciliation nationale qui clôtura en 2005 le chapitre de la décennie noire (1991-2002) en offrant l’amnistie à 6000 combattants de l’Armée islamique du salut (AIS).
Instigateur du Hirak malgré lui
Durant ses trois premiers mandats, le natif d’Oujda profitera des centaines de milliards de dollars générés par l’envolée des cours du pétrole pour développer de grands projets (autoroute Est-Ouest, Grande mosquée…). Sans réelle vision pour le pays, il échouera en revanche à mettre en place une économie solide capable de créer des richesses pérennes.
Sa dernière mandature coïncidera avec le début de sa maladie et la récession économique qui l’empêchera de subventionner aussi généreusement qu’au moment des « printemps arabes » de 2011.
Impotent, aphasique et ne se déplaçant plus qu’en chaise roulante, en fin de règne, celui qui affirmait qu’il ne serait pas « trois quarts de président » aura été malgré lui le grand instigateur du Hirak, le mouvement populaire l’ayant destitué de son fauteuil présidentiel.
Mansouria Fodeili