Nadjib Siramdane est architecte spécialisé en urbanisme et projet urbain de l’université Abdel Hamid Ibn Badis de Mostaganem. L’Algérien de 29 ans, et sa collègue Imène Zitouni, ont été sélectionnés parmi 14 finalistes du concours international Bunyan organisé par le Qatar. En attendant de connaitre le verdict ce vendredi, le lauréat 2016 Art et Tram de la ville d’Oran nous parle de son métier et de cette première expérience hors des frontières de l’Algérie.
Vous avez été sélectionnés avec votre binôme, Zitouni Imène, pour le concours Bunyan au Qatar. Pouvez vous nous dire comment s’est passé le processus de sélection?
Nadjib Siramdane : notre participation est un pur hasard. C’est en surfant sur les réseaux sociaux que nous sommes tombés sur la page du concours . On s’est dit pourquoi pas ! D’autant plus qu’on est tous les deux fascinés par la culture arabo-musulmane. La candidature était ouverte au grand public du monde arabe et musulman.On a envoyé notre dossier. Quelques jours après, on a été contactés par les organisateurs de l’évènement qui nous ont annoncé que notre projet était sélectionné parmi une centaine de participants. Ensuite, on a fait partie d’une short-list de 14 finalistes. Il faut savoir que tous les projets ont été évalués par un jury de de renommée internationale d’architectes du Moyen-Orient.
Quel projet avez vous présenté?
On devait présenter un projet de minaret moderne pour la ville musulmane de demain. Une intégration imposante dans son milieu et qui représente à la fois un repère et une figure de design urbain. Fans de calligraphie arabe et de sa fluidité formelle, l’idée générale était de reproduire la lettre Noun (ndlr, caractère coranique), dotée d’une dynamique formelle remarquable. La traduction de ce geste nous a menés a une forme pure, insolite et loin de tout stéréotype.C’est un minaret fonctionnel et conçu comme une sculpture design qui anime et recrée l’image mentale de l’usager du lieu dans une scénographie urbaine spirituelle. Une structure high-tech et écologique car dotée d’un système de filtrage d’air urbain et de capteurs nano couvrant la peau extérieure du minaret et lui assurant une auto-suffisance en énergétique.
Quelles sont les contraintes imposées dans ce genre d’appel à candidatures?
Généralement, c’est le facteur de temps. On est appelés a élaborer nos travaux dans un laps de temps limité tout en devant assumer nos engagements professionnels
Est-ce le premier projet international auquel vous participez?
Oui, c’est une première pour nous. Cela ne sera pas la dernière.
Comment vous faites vous pour vous faire connaitre?
Justement on ne fait rien.De notre coté, on travaille dur. On fait ce qu’on aime sans rien attendre en parallèle. Et si on se fait connaitre un jour, ce ne sera que mérité.
La reconnaissance pour un architecte passe-t-elle par une dimension internationale?
Bien évidement.Un titre international est très attirant pour un architecte mais pour moi la reconnaissance peut être le fruit d’une satisfaction personnelle. Quand on honore sa profession et ses engagements vis à vis des usagers, c’est en quelque sorte une reconnaissance.
Les pays du golfe sont-ils ces nouveaux lieux qui offrent des opportunités de travail?
Leur vison du progrès est basée sur l’investissement dans le potentiel humain. Ils ouvrent les portes aux innovateurs des quatre coins du monde. Ils posent les bases de la renaissance de leur civilisation.
Quels sont les pays, autres qu’arabes, qui pourraient venir vous concurrencer dans le Golfe?
Tout le monde veut avoir une place dans les pays duGolfe.C’est un terre vierge pour réaliser ses rêves les plus fous. Les dirigeants de ces pays croient en leurs idées. Pour eux c’est: « Sky is the limit » .
Comment ces pays imaginent ils l’architecture pour les 20 ou 30 prochaines années?
Cette vision du future est toujours en métamorphose. Mais Je crois que les expo Dubaï 2020 et Qatar 2030 vont poser les premières pierres de l’architecture de demain.
En tant qu’arabophone est-ce que c’est plus facile de faire votre place dans ces pays?
Pas forcement.Ce sont les compétences qui doivent être récompensées.
En cas de victoire au concours Bunyan, est ce que cela vous ouvrirait d’autres portes dans la région?
On espère que cela va ouvrir plus de portes. On poursuivra notre combat pour arriver quelque part et réaliser nos visions sur le terrain.
Pourquoi les pays du Maghreb ne sont-ils pas aussi ambitieux que les Etats du Golfe?
On voit la naissance de plusieurs projets prometteurs au Maghreb.Il suffit juste d’améliorer les politiques publiques. Il faut aussi investir dans les jeunes talents et mettre en valeur le rôle de l’université dans la production scientifique et architectural.
Au final, est-il facile d’exercer son métier en Algérie?
Etre architecte est parmi les métiers les plus difficiles dans le monde pas seulement en Algérie. C’est un sport de combat lié au contraintes économique, politique, idéologique . Comme tout autre production intellectuelle ou artistique, ce métier ne peut jamais être associé à la facilité.
Entretien réalisé par Nasser Mabrouk