C’est une vraie révolution dans la doctrine de l’armée que la future constitution va instaurer dans sa nouvelle mouture. A l’initiative du Président de la république, Abdelmadjid Tebboune, l’Armée algérienne pourra désormais participer, hors de ses frontières, aux forces de maintien de la paix.
C’est l’article 91 du projet de révision de la Constitution – qui sera soumis à référendum le 1er novembre prochain – qui confère au Président de la République le titre de « Chef suprême des Forces armées de la République », et qu’il le désigne en tant que « responsable de la défense nationale » ayant la capacité d’envoyer sur des théâtres d’opérations extérieures « des unités de l’Armée nationale populaire à l’étranger ».
Si le chef de l’ Etat peut déclencher l’envoi des troupes, il devra toutefois en passer par le parlement qui devra approuver cette décision « à la majorité des deux tiers » précise l’article de loi.
« L’Algérie peut, dans le cadre des Nations Unies, de l’Union africaine et de la Ligue des Etats arabes, et dans le respect de leurs principes et objectifs, participer au maintien de la paix », prévoit la nouvelle Constitution.
Cette réforme doctrinale ne fait pourtant pas l’unanimité en Algérie puisque des voix se sont élevées pour contester cette remise en question du sacro-saint principe de non immixtion à l’étranger.
Il faut ainsi remonter à 1973, et la guerre du Kippour, pour retrouver trace d’une intervention militaire algérienne hors des frontières.
Si certains craignent la fin de la neutralité algérienne au niveau international, le président du Comité d’experts chargé de la révision constitutionnelle, Ahmed Laraba, répète quant à lui que cela « ne remet nullement en cause la doctrine de non ingérence » du pays.
« Le fait que l’Algérie puisse participer à ces opérations ne signifie pas qu’elle a rompu avec son principe fondamental de non ingérence dans les affaires internes des Etats.La disposition en question (Art 31) vise à donner la possibilité pour le président de la République d’envoyer des troupes dans le cadre des opérations de maintien de la paix des Nations Unies (casques bleus) et uniquement dans ce cadre », avait déjà déclaré le Professeur d’Université.
Et d’ajouter : « Il faut distinguer les opérations de maintien de la paix qui sont strictement défensives de ce qui est appelé les interventions militaires. Dans ce genre d’opérations, il n’y a pas d’affrontements, ni d’usage de l’armement lourd ».
Pour l’Armée nationale populaire (ANP), cette modification constitutionnelle est jugée « pleinement conforme à la politique étrangère de l’Algérie » qui, précise-t-elle, « repose sur des principes fermes et immuables, à savoir le rejet du recours à la guerre, la non-ingérence dans les affaires internes des Etats ainsi que la résolution des conflits et des différends internationaux par des voies pacifiques, conformément à la légalité internationale représentée par les instances internationales et régionales ».
Elle estime en outre que la stabilité du pays « exige – à la lumière de la conjoncture régionale actuelle et ce qu’elle sous-tend comme mutations et changements – le renforcement de la protection de la sécurité de notre patrie ».
Pour rappel, l’ANP est la seconde sur le continent africain. Elle dispose actuellement d’une force mobilisable de 500 000 hommes.
Mansouria Fodeili